A notre père et époux,
Aujourd'hui, nous sommes là, tous réunis, le cœur lourd mais aussi rempli de gratitude pour le voyage que tu nous as offert. Un voyage, qui ressemble tant au train de la vie dont on aime parler, avec ses arrêts, ses détours, ses rencontres et parfois, ses départs inattendus. Tu es né le 29 août 1953, petit blondinet bouclé espiègle surnommé Pasqualino ou Lino. Tes parents, partis de cette belle Sicile, ont posé leurs valises à Gardanne pour le travail, et toi, tu as grandi dans cette "vieille ville" où les portes étaient ouvertes, où les télés en noir et blanc réunissaient les copains, et où les repas sentaient bon le partage et le bien vivre ensemble. Ça, c’était ta première leçon de vie : l'ouverture et la générosité. Tu n'étais pas vraiment fan de l'école, on le sait, mais la soif de réussir, ça, tu l'avais chevillée au corps. Ta passion pour les voitures t'a mené à ton CAP de carrossier peintre, mais c'était surtout la flamme de ton ambition qui brûlait fort, pour exhausser ton rêve, ouvrir ton propre garage. C'est aussi de cette époque que nous viennent les souvenirs qui nous ont été raconté du jeune casse-cou, de cette vraie tête brûlée que tu étais, où tu nous disais souvent « je connais toutes les bêtises à faire, donc vous ne m’aurez pas ». Un côté espiègle qui ne t'a jamais vraiment quitté. Et, il y a eu Carpiane, pour faire ton service militaire, ou tu étais maréchal des logis-chef dans la Cavalerie comme ton nom. Jouant de cette coïncidence avec humour. Gradé, respecté, tu savais fédérer les hommes. C'était ton charisme naturel, celui qui te suivrait toute ta vie. En 15 mars 1975 tu as épousé notre mère bien-aimée, Ta Lina. Ensemble, vous aviez des projets de vie pleins la tête, construire un foyer et avoir des enfants. Avec l'aide précieuse de ton beau-père et de ton beau-frère, de vos propres mains, agglo par agglo, durant 2 ans tous les week-end, vous avez bâti le foyer où nous avons grandi et vécu tant de beaux souvenirs. Cette maison, représente tellement : le fruit de votre travail, de votre amour, et la fondation sur laquelle notre vie de famille a été construite. Ton objectif professionnel était aussi clair : ouvrir ton propre garage, devenir concessionnaire, pour mettre notre famille à l'abri. Tu étais un travailleur acharné, autodidacte et ambitieux, tu ne comptais pas tes heures, travaillant dur dans le garage de la maison, même les week-ends avec Maman qui t’aidait à poncer les voitures. Ton premier garage a ouvert ses portes en 1988. Quelle fierté ! Et Maman, ta complice, ton équilibre, avait mis sa carrière entre parenthèses pour vous lancer dans cette aventure, animé par cette conviction profonde : "On n'a rien sans rien, le travail, c'est la clef de la réussite." Tu as brillamment réussi, et on t'en remercie du fond du cœur, on a manqué de rien, on a eu une belle enfance. Tu nous as transmis les valeurs de la vie : le travail et la discipline, l'émerveillement et l'ouverture sur le monde. Tu nous as appris le respect des plus anciens, l'ambition, ne pas avoir peur de créer et d'investir. Et puis, il y avait le partage, un repas en famille, une fête entre amis, chanter et danser ensemble. Tu nous as donné l'esprit de famille, un lien indéfectible que tu as tissé jour après jour.
Mais le travail, ce n'était pas tout. Tu savais aussi profiter de la vie. L’OM, la pêche, ton bateau… Ah, la pêche ! Cette passion que tu as transmise à tes petits-enfants, famille et même tes amis, et ce titre de champion de France de pêche au thon ! Ça, c'était notre père le compétiteur ! Tu adorais être entouré, la solitude c’était pas pour toi. Tu avais l'art de recevoir, que ce soit pour les soirées foot-pizza, les belotes, les soirées dansantes, les grands repas … Et tes blagues, parfois crus ! Qui ne se souvient pas des "champignons lon-laine" ? Tu avais cet humour bien à toi, mais toujours là pour détendre l'atmosphère et faire la fête. Et tes bateaux, que fièrement tu avais nommés Lina I et II ! Ta deuxième maison, ton havre de paix, le port de Bandol. Là, c'était les apéros à n'en plus finir avec tes amis et même avec des passants inconnus que tu abordais sur le quai. Tous te surnommaient le Capitaine de la panne À. Tu naviguais au gré de la Méditerranée, de l’aube à la nuit tombée, le rosé ou le pastis à main et toujours aussi émerveillé par la mer qui t’apaisait… C'était là que tu te sentais libre, là que tu cultivais ces roses de la vie, ces moments de pur bonheur. Mais au-delà de ces grandes passions, ce que nous garderons à jamais, ce sont ces petits et grands souvenirs que tu as créés pour nous. Tu nous as appris à nager, à dompter la mer, à pêcher au harpon, à cueillir des oursins sur les rochers de Bandol. Tu nous as initiés aux plaisirs des sports, de la pêche, du ping-pong, et même du ski, toutes ces passions que nous avons à notre tour transmises à nos enfants. Que dire de ton incroyable créativité ? Comment oublier cette année où la neige est tombée si fort que tu nous as attachés à la voiture pour nous tirer jusqu'au canal, juste pour qu'on puisse dévaler la pente en ski ? Wouai, c’était un peu dangereux, faut l’avouer !!! Mais c’était toi, ce mélange de génie et de folie. Et comment ne pas se souvenir de cet été caniculaire où, avec le fond de la coque d'un camping-car, tu nous as fabriqué une piscine pour qu’on puisse se rafraîchir ? Ou de cette autre fois où tu avais décidé de mettre la planche à voile dans la piscine, juste pour nous apprendre l’équilibre ! Des moments comme ça, pleins de vie et de rires, on en a des milliers. Nos vacances en camping-car, les virées en moto-cross à quatre sur la colline d’en face de la maison... C'était toujours des aventures. Tu nous as donné des ailes et des racines, la soif de découvrir et la sécurité de savoir d'où on vient. Mais on ne peut pas parler de toi, sans parler de ton caractère unique. Ton côté franc parlé et spontané, et cette difficulté à reconnaitre tes torts, étaient aussi une part de toi. C'était ton caractère assumé et on a appris à l’aimer. Mais au fond, ton cœur disait autrement. Avec le temps, et surtout ces dernières années, on a tous compris que derrière cette façade se cachait une immense hypersensibilité, dont tu avais du mal à assumer. Et aujourd’hui, avec nos cousins cousines, on se dit souvent ah ça c’est le caractère des CAVALERI, enfin c’est plutôt nos conjoints qui ne plaignent ! C’était ta signature et pour le coup c’est devenu un peu la nôtre.
Et comme dans toute vie, il y a aussi eu des épines. Le départ de ta regrettée mère, à 58 ans. C’est cette même maladie, qui s'est déclenchée chez toi l'année suivante, tu disais « Je partirai moi aussi à 58 ans, je me ferai pas vieux, donc je veux croquer la vie à pleine dent ». Tu étais dans le déni de cette maladie, tu as décidé de vendre le garage à 50 ans pour profiter pleinement, de ton bateau, de ta pêche. Et pour le coup tu as bien profité. Pendant cette période tu as semé des roses, tu as cultivé la joie, tu célébrais la vie, mais cette épine, Papa, était toujours présente et sournoisement te détruisait petit à petit. C’est celle qui a fait en sorte que cette longue maladie qui s’est déclenchée il y a six mois, soit incurable. Mais tu avais cette force, ce courage, et tu nous l'as encore montré jusqu'à ton dernier souffle. Face à la souffrance de ces derniers mois, tu as fait preuve d'une résilience immense, affrontant la maladie avec dignité. Jusqu'au bout, tu es resté le capitaine de ton navire. La semaine dernière encore, tu nous l'as confié, avec ta franchise habituelle : "Je n’ai pas peur mourir, je vais partir cette semaine, je le sens ». C'était un ultime acte de courage, une décision prise en pleine conscience. Tu as décidé de ton départ, Papa, comme tu as toujours décidé de ta vie : avec force, courage et une dignité inébranlable. Et s'il y a une chose qui résume tout, c'est l'amour de ta vie, notre mère. Elle était ton oxygène, ton âme sœur, ta vie. On est tous d’accord pour dire que le mot que tu as le plus prononcé dans ta vie, c'est "Linaaaaaa" avec cette voix si particulière. Reconnaissant, sans jamais lui dire, tu confiais a beaucoup de personnes que tu n'aurais pas pu vivre sans elle, elle était ton pilier, tes yeux, ta force, et aussi ta sagesse. Notre Mounette, tu es une warrior, une mère et une femme exceptionnelle, notre équilibre. Même si c'est dur de t'avoir perdu, nous savons qu'il n'y a pas de plus belle preuve d'amour que le lien qui vous unissait et qu’on garde en exemple. Aujourd'hui, nous savons que de là-haut, tu la regardes, fier d’elle. Tu sais, ces derniers jours, nous avons reçu des centaines de témoignages d'affection de personnes qui ton connu durant ton chemin de vie et qui rejoignent notre hommage. Tous garderont de toi l'image d'un homme fort au grand cœur, passionné, généreux, blagueur et travailleur. C'est le plus bel héritage que tu pouvais nous laisser : une mémoire collective d'amour et de respect, et sache qu’on te fera honneur. Aujourd'hui, alors que ton train de la vie est arrivé à son terminus, tu laisses un siège vide dans notre wagon. Mais tu nous as légué des souvenirs inoubliables, à jamais gravés dans nos mémoires. Dans ces moments, on réalise que la vie nous inflige parfois des étapes difficiles que nous essayons de surmonter avec courage et dignité. Mais elle nous rappelle aussi qu’elle est belle et éphémère, qu’il faut profiter de chaque instant, savoir pardonner et faire le bien autour de soi. Tu as vécu pleinement, tu as semé des roses sur ton chemin, même si parfois, les épines de la vie étaient là pour te rappeler, et nous rappeler à tous, la fragilité de la vie. Ton voyage a été riche, vibrant et rempli d'amour. Et tu le disais toi-même : « Je ne regrette rien, j'ai eu une belle vie ». Repose en paix. Ton souvenir restera gravé dans nos cœurs, ton étoile brillante nous guidera toujours et on te fera honneur. Merci, pour tous, nous t’aimons.